Interview exclusive sur Grains de Sel magazine

Evv Hill, illus­tra­trice diable­ment créa­tive, expose à Away Hostel

Sous le nom ironique­ment diabo­lique d’Evv Hill, l’illus­tra­trice lyon­naise Stépha­nie Meyer crée tout azimut des images colo­rées, ludiques et joyeuses, sur des affiches, des pièces en bois ou en céra­mique, du texti­le… Autant d’objets dési­rables quelle expose chez Away Hostel jusqu’à début novembre.

Elle a une voix d’en­fant, un sourire enjô­leur, mais les yeux inquiets de celles pour qui la vie n’a pas toujours été tendre. Et c’est vrai que l’en­fance ne fut pas syno­nyme de douceur pour Stépha­nie Meyer, née à Lyon il y a quarante ans, au milieu d’une fratrie de quatre enfants. La petite fille à l’ima­gi­naire poétique et à la créa­ti­vité pagailleuse n’a pas toujours été comprise par ses parents méde­cins, un peu trop sérieux à ses yeux. Elle a grandi avec un certain mal être, peinant à trou­ver sa place. “Je déco­rais tout le temps ma chambre, je prenais en photo les nuages”, se souvient-elle, atta­blée devant un thé glacé. Ado, elle est “un peu hippie sur les bords”, à coudre ses propres panta­lons. A l’école, ce n’est pas la fête non plus. “Je n’étais pas bonne car trop rêveuse; j’étais nulle en maths! Je voulais faire les Beaux-arts, mais mon dossier était trop mauvais.” 

Une illus­tra­trice inspi­rée par l’art tribal, le graf­fiti et les hippies

La voilà donc inscrite dans une école privée d’arts appliqués -“Là, j’ai cartonné!”, affirme-t-elle – puis elle enchaîne avec des études de commu­ni­ca­tion. Après un début de carrière en agence de design, Stépha­nie reprend son indé­pen­dance pour créer son propre studio de créa­tion graphique qui marche plutôt pas mal. Paral­lè­le­ment, elle fraye avec le milieu de l’illus­tra­tion alter­na­tive lyon­naise, et plus parti­cu­liè­re­ment celui de la micro-édition. Puis elle entre chez Super­po­si­tion, alors jeune collec­tif de street art, pour accom­pa­gner des artistes émer­gents du secteur. Mais après y avoir consa­cré beau­coup d’éner­gie, elle réalise qu’il est peut-être temps d’oser penser davan­tage à elle. L’an­née 2020 arrive et avec elle une certaine pandé­mie. “Cet été-là, je suis partie en Haute-Loire et j’ai commencé à dessi­ner et à créer des person­nages” raconte-t-elle, inspi­rée tout à la fois par l’art tribal, les délires des hippies et du graf­fiti. 

Les amours de petits diables d’Evv Hill

Parmi ses dessins, il y a ces diablo­tins qu’elle aime tant, endor­mis dans les flammes de l’en­fer. Elle les voit comme “un pied de nez” à cette ville de Lyon qu’elle trouve encore “très reli­gieuse et très froide”: “Oui, ils sont en enfer, mais ils sont merveilleux et gentils; ils sont là pour dire qu’on a tous en nous une part de diablo­tin et que ce n’est pas grave de ne pas être gentil parfois.” Ces petites créa­tures illus­trent à merveille son nouveau nom d’ar­tiste: Evv Hill. “Evv, c’est la première femme qui a foiré son coup!, explique Stépha­nie en riant. Hill, c’est pour les collines parce que j’aime beau­coup la nature. Et puis “Evil” c’est pour les démons, mais avec une touche d’iro­nie.” Car Stépha­nie insiste: il y a beau­coup de couleur, d’amour et de paix dans son geste artis­tique. Et d’au­tant plus depuis qu’elle est deve­nue mère il y a un an. “Tout me ramène à l’en­fance! J’ai déjà ce côté enfan­tin, je suis une femme-enfant, mais avec mon fils, c’est encore mieux. Le monde adulte, je l’ai toujours trouvé dur.”

 

Une expo chez Away Hostel pour jouer tous ensemble

Pour Stépha­nie, il y a pour nous tous un besoin infini de nous retrou­ver: “Rien qu’un petit geste, parfois, ça aide les gens.” Elle a conçu son expo­si­tion Jouons ensemble, chez Away Hostel, l’au­berge de jeunesse du bas des pentes de la Croix-Rousse, dans cet esprit de partage : “Je veux que les gens regardent mes illus­tra­tions et ressentent vrai­ment cette bien­veillance, cette douceur, cet amour.” Elle expose plusieurs formats d’af­fiches repré­sen­tant ses tattoos fleurs, sa mitaine Unity ou encore ses diablo­tins, des petits vases et des smileys en céra­mique, des suspen­sions en bois sculp­tées et peintes à la main, des créa­tions textiles, des bijoux en plexi­glas et bien d’autres surprises. Stépha­nie a prévu de faire du dernier jour d’expo, le 4 novembre, une grande fête fami­liale avec des ateliers, des colo­riages et des jus de fruits colo­rés pour les enfants. Et déjà l’hy­per créa­tive regarde vers l’ave­nir: “Cette expo­si­tion, c’est une révé­la­tion pour moi, un vrai commen­ce­ment. Je pense que ça va être encore mieux après. Je suis comme une jeune illus­tra­trice fina­le­ment”, lance-t-elle de son timbre de petite fille bien déci­dée à faire désor­mais ce qu’elle veut.

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Expo­si­tion-vente Jouons ensemble, jusqu’au 4 novembre 2023 chez Away Hostel, 21 rue Alsace Lorraine, Lyon 1er. Entrée gratuite. Prix des œuvres d’Evv Hill: de 6 à 150€. Décro­chage ludique et fami­lial le samedi 4 novembre 2023 de 14h à 19h. Prix libre. Les créa­tions d’Evv Hill sont aussi vendues chez Atelier Muguette, 138 rue Bugeaud, Lyon 6e.

Par Clarisse Bioud, rédactrice en chef